8 Feb 2014

La Politique de Sécurité et Défense Commune (PSDC). Dix mots-clés

(BRUXELLES2) L’Europe de la défense, plus exactement la Politique (européenne) de sécurité et de défense commune (PeSDC) (*), est un des secteurs qui a connu des avancées variables ces dix dernières années. Si des progrès institutionnels ont été engrangés avec le Traité de Lisbonne, entré en vigueur en décembre 2009, la dynamique politique a, en revanche, été perdue de vue.

UNE STRATÉGIE DE DÉFENSE ET DE SÉCURITÉ

La PSDC a une mission essentielle : être un instrument opérationnel de gestion de crises, survenant hors de l’Union européenne, aux côtés des autres instruments européens (diplomatique, humanitaire, économique, juridique). C’est cette possibilité d’agir sur plusieurs fronts et la pluralité d’acteurs qui constituent à la fois la force et la faiblesse de l’UE. En tout cas son originalité !
Fin 2003, l’Union européenne adopte une stratégie de sécurité commune. À partir d’une analyse des défis mondiaux et des principales menaces pesant sur la sécurité de l’Europe (terrorisme, prolifération des armes de destruction massive, conflits régionaux, déliquescence des États), celle-ci définit trois objectifs :
  • « faire face aux menaces en menant une politique de prévention des conflits reposant sur une combinaison des moyens d’action civils et militaires » ;
  • « construire la sécurité dans le voisinage européen en s’impliquant au Moyen-Orient, dans les Balkans et le Caucase » ;
  • « promouvoir un multilatéralisme efficace en défendant et en développant le droit international, dans le cadre fondamental de la Charte des Nations unies. »
Cette stratégie a été définie au Conseil européen du 12 décembre 2003, au terme de plusieurs mois difficiles, marqués par un « schisme » au sein de l’Union européenne sur l’intervention en Irak, celle-ci étant soutenue par certains États (Royaume-Uni, Espagne, Portugal, Italie et les pays de l’Est) et repoussée par d’autres (Allemagne, France, Belgique et les pays neutres). Elle a été amendée, à la marge en décembre 2008, au sommet européen tenu sous présidence française.

LE CHEF : LE HAUT REPRÉSENTANT

Souvent dénommé « diplomate en chef » de l’Union européenne, le Haut représentant est un peu plus que cela. Il est à la tête de la politique étrangère, comme de celle de la politique de sécurité et de défense de l’Union (PSDC). Il a – en cette matière – le pouvoir d’initiative, au nom des États membres, en lien avec la Commission européenne pour les questions budgétaires ou économiques. Une fois élaborées, c’est lui qui a la responsabilité d’exécuter les décisions ainsi prises.
• Institué par le Traité d’Amsterdam, entré en vigueur le 1er mai 1999, le poste est d’abord assuré par Javier Solana, ancien secrétaire général de l’OTAN et ancien ministre des Affaires étrangères (socialiste espagnol). Il exerce également la fonction de secrétaire général du Conseil. Son premier mandat est renouvelé pour cinq ans au Conseil européen de juin 2004, et pour quelques semaines supplémentaires en octobre 2009 afin de faire la « soudure » avec le nouveau Haut représentant.
• Depuis le 1er décembre 2009, et l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, le poste change de physionomie. Le Haut représentant est également commissaire européen et vice-président de la Commission et préside le conseil des ministres des Affaires étrangères. Le poste est tenu par Catherine Ashton, ancienne commissaire européenne au Commerce (travailliste britannique).
Lire aussi la fiche-mémo (sur le Club) : Les fonctions et pouvoirs du Haut représentant, d’après le Traité de Lisbonne
LA CHEVILLE OUVRIÈRE : LE COPS
Le Comité politique et de sécurité (COPS) est le lieu où se forge la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et donc la politique de défense. Composé des ambassadeurs de l’Union européenne, il est l’équivalent du COREPER dans le domaine de la PESC. C’est, ici, que les « 28″ doivent accorder leurs violons sur des questions aussi sensibles que l’indépendance du Kosovo, les sanctions contre le président biélorusse ou les négociations avec l’Iran sur le nucléaire. C’est là que tous les généraux, chefs de mission ou d’opération ainsi que les représentants spéciaux de l’UE, viennent rendre compte. C’est dans cette enceinte que s’élaborent les missions civiles ou opérations militaires de l’Europe de la Défense, comme la mission des observateurs en Géorgie ou l’opération militaire en Somalie et bientôt l’opération militaire en RCA.
• Institutionnalisé par le Traité de Nice (signé le 26 février 2001, entré en vigueur le 1er février 2003), le COPS est présidé désormais de manière permanente par un délégué du Haut représentant depuis l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne (et non plus par l’ambassadeur du pays qui a la présidence de l’UE, comme auparavant).

L’INSTRUMENT JURIDIQUE: LA DECISION

Toute opération, civile ou militaire, nécessite un accord politique des États membres à l’unanimité, définissant le mandat, l’objectif visé, et désignant le chef de l’opération. Cet accord (anciennement nommée action commune) est formalisé dans une décision juridique, décidée à l’unanimité et publiée au Journal officiel.

LE FINANCEMENT : ATHENA OU BUDGET UE

Les opérations militaires de l’UE sont financées par chaque État participant. Mais afin d’assurer une certaine solidarité, un « mécanisme de gestion du financement des coûts communs des opérations de l’UE ayant des implications militaires ou dans le domaine de défense », dit Athena », a été mis en place en mars 2004 et révisé régulièrement (en dernier lieu en 2011). Tous les États membres (sauf le Danemark) contribuent à certaines dépenses, strictement définies (les coûts communs), selon un coefficient fixé en fonction du produit intérieur brut. Ce financement ne correspond cependant qu’à environ 1/6e ou 1/5e des frais réels d’une opération.
Les missions civiles sont normalement financées sur le budget communautaire (budget PESC) ; une part étant souvent assurée par les États membres ou États tiers, sous forme d’apports en hommes (personnel détaché) ou de matériel.

LA DÉFINITION DES MISSIONS DE PETERSBERG

Adoptées en 1992, en pleine guerre de Yougoslavie, dans une réunion informelle des ministres des Affaires étrangères et de la Défense de l’UEO au château de Petersberg (près de Bonn), ces missions délimitent le champ d’intervention de l’Union européenne. Elles figurent désormais à l’article 43 du Traité UE (ancien article 17 du TUE) en tant que « missions humanitaires et d’évacuation, missions de maintien de la paix et missions de forces de combat pour la gestion des crises, y compris les missions de rétablissement de la paix ». Le Traité de Lisbonne a ajouté à cette liste certaines missions déjà assurées, comme les missions de conseil et d’assistance en matière militaire (type EUTM Somalie ou EUTM Mali).

MISSIONS CIVILES OU OPÉRATIONS MILITAIRES

La PSDC comprend des opérations/missions militaires et des missions civiles. Dans les deux cas, l’objectif reste de « procurer de la sécurité » au pays (ou à la zone) concernée : en assurant le maintien de la paix, ou en formant, restructurant, assistant les forces existantes qui constituent pour un État l’essence même de sa souveraineté (police, justice, douanes, armée, frontières). La distinction entre les deux peut, parfois, ne pas être évidente. Et la qualification de « civile » ou « militaire » obéit alors à des considérations autant politiques qu’opérationnelles. Ainsi, dans une mission « civile », des militaires peuvent être présents (exemple au Kosovo, en Guinée-Bissau ou au Niger), le port et l’usage d’armes peuvent être autorisés (au Kosovo, une force de réserve de maintien de l’ordre, formée de gendarmes, carabinieri et policiers militaires a été déployée). Et ces missions se déploient, parfois, en zone de guerre (Irak ou Afghanistan par exemple).

LES CONCEPTS

Les militaires travaillent classiquement sur différentes possibilités d’action. De nombreux « concepts » ont ainsi été élaborés par l’État-major de l’UE depuis 2000, surtout après l’opération militaire au Congo en 2003. La plupart ont été remis à jour en 2008 : planification militaire aux niveaux politique et stratégique (2001), génération de forces (2002), réaction rapide militaire (2003), transport et mouvements stratégiques (2006), nation cadre (2002 révisé 2007), planification globale (2005), soutien à l’État d’accueil lors des opérations de gestion de crises (2006), soutien logistique, réception, stockage, transfert et intégration RSOM&I (2006), Battlegroups – groupements tactiques (2006), soutien médical et de santé (2007), réaction rapide maritime (2007), réaction rapide aérienne (décembre 2007), information militaire (2008), contrôle et commandement militaire (2008), réforme du secteur de la sécurité (2008), information géospatiale (2008), travail en réseau NEC (2008), médiation et dialogue (2009), missions de police (2009), renseignement (2010), protection des civils dans les missions et opérations PSDC (2010), protection des enfants soldats (2010), missions Justice Etat de droit (2011), égalité hommes femmes (2012), protection de l’environnement (2012), Etc.

LA FORCE DE RÉACTION RAPIDE DE L’UE : LES BATTLEGROUPS

Conçus en 2004 après l’opération Artémis (au Congo), sur une initiative franco-britannique-allemande, les groupements tactiques 1500 (plus souvent dénommés Battlegroups ou GT 1500) sont la « force légère de réaction rapide » de l’UE. Forts d’au moins 1500 hommes (en général plutôt 2000 hommes), disposant d’appuis tactique et logistique (transport aérien) pour être autonomes, ils doivent arriver sur le terrain au plus tard 15 jours après l’approbation du concept de gestion de crise (CMC). Ils peuvent assurer leur mission durant un à quatre mois. Deux groupements GT1500 sont (théoriquement) de permanence chaque semestre. Ces battlegroups n’ont jamais été utilisés jusqu’ici. Et un débat s’est engagé sur l’opportunité d’assouplir le concept, pour avoir une réserve stratégique d’hommes ou un élément précurseur de déploiement lors d’une opération militaire (le temps que la génération de forces proprement dite se réalise).

LA GÉNÉRATION DE FORCES

C’est le processus qui permet à l’Union européenne de comptabiliser les forces que les États membres sont prêts à fournir pour une opération militaire à l’extérieur de l’UE. Sans « offres significatives des États membres », une opération ne peut être lancée. C’est aussi l’occasion pour chaque pays de préciser la durée de son engagement et les limitations (caveats) qu’il entend avoir dans certaines situations (zones et règles d’engagement, emploi de la force, etc.).

http://www.bruxelles2.eu/defense-ue/gestion-de-crise/la-psdc-en-dix-mots-cles.html